Avec son accord, nous publions ci-dessous le courrier que notre camarade Aline Chitelman a envoyé à la rédaction d’Ouest-France, rubrique courrier des lectrice set lecteurs. Ce courrier a été publié dans l’édition du 29 mars.
Monsieur François Lechat-Le Calvez considère, dans son courrier, que créer un espace non-mixte dans une manifestation serait discriminatoire. Il assimile cet espace, que nous appelons souvent « carré femmes » à une dérive qu’il qualifie de séparatisme, comme un rejet des hommes, comme un processus malsain qu’il compare à d’autres formes de « séparatisme ». Dérive et séparatisme, pour qualifier le danger.
De quoi parle-t-on exactement ? Au sein d’une manifestation pour les droits des femmes, ce « carré femmes » permet aux femmes qui le souhaitent de rester entre elles. Il peut être à l’initiative de femmes lesbiennes, de femmes victimes de violences, de femmes qui n’ont pas envie de se faire agresser par des hommes ayant trop bu (nous l’avons vécu à Nantes le 25 novembre), bref, de femmes qui ont envie de manifester tranquillement. Ce dispositif n’oblige aucune femme à y participer, et aucun homme à ne pas manifester ailleurs dans le cortège. Pourquoi les autorités devraient-elles s’en mêler ?
Mettre en cause le choix des femmes, leurs formes d’organisation, leur façon de se faire entendre, en quoi est-ce démontrer qu’on n’est ni misogyne, ni favorable au patriarcat ? Qui vous empêche de rejoindre l’association « Zéro macho » ? Les femmes peinent à se faire entendre sans subir les railleries et les diatribes, les critiques contre le #me.too, « trop agressif, ne respectant pas la présomption d’innocence », ont été très nombreuses, et ne provenaient pas toutes d’hommes. Et bien contre toute attente, non, toutes les femmes n’ont pas envie de se faire importuner. Et elles le disent.
Dans un autre registre, pourquoi a-t-il fallu adopter des lois sur l’égalité professionnelle ? Pour l’égalité salariale ? Pour que les filières professionnelles soient mixtes ? Pour qu’il y ait des quotas dans les conseils d’administration ? Que les candidatures électorales soient à parité, ou que, pour les élections professionnelles, elles reflètent le salariat qu’elles représentent. ? Parce que pendant trop longtemps, ce qui a prévalu, c’était les intérêts des hommes, les réunions non mixtes, c’étaient des hommes entre eux, ne s’apercevant même pas qu’ils n’étaient qu’entre eux.
Le monde change.
Aline Chitelman, mars 2021